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Interview de Victor Dermo : «Diamond Little Boy, le street manga à la française»


Nous allons vous parler d’un jeune mangaka français, du nom de Victor Dermo. Ayant sorti sa première oeuvre, Diamond Little Boy, appartenant à un genre nouveau nommé « Street Manga », il en profite pour nous en dire davantage sur les processus d’élaboration d’un manga. Et ce, sans oublier de nous parler du sien.

JJ: Première question: présente-toi!

VD: Donc moi, c’est Victor Dermo. J’ai écrit un manga qui est sorti le 1er octobre. Il est disponible sur un site qui s’appelle diamondlittleboy.fr, et vous pouvez suivre les actus sur ma page facebook ou mon compte instagram, Victor Dermo.

JJ: D’où te vient cet amour pour la culture nippone et les mangas?

VD: En fait, c’était quand j’étais petit. J’étais un peu bercé dans les animes, et puis un cousin m’a amené à persévérer dedans, notamment avec la musique et les chansons des séries animés.
C’est comme ça que je me suis un peu plus intéressé à ce domaine. Moi, je suis un mec qui aime toujours se donner à fond, ce qui veut dire que quand je me mets dans quelque chose, je suis toujours en plein dedans.
Et là, c’est tombé sur le Japon, et donc les mangas.

JJ: Cite-moi un manga qui soit ta référence, celui qui t’a vraiment marqué?

VD: Je crois qu’il y en a deux. Le premier s’appelle Sun-Ken Rock, fait par un coréen du nom de Boichi, mais qui travaille au Japon. La première fois que je l’ai vu, c’était à la Japan Expo de 2008.
Il était en présentation, sa série venait juste de sortir, et il y avait des petits extraits gratuits, donc j’en ai pris un. Et quand je suis rentré chez moi, je l’ai feuilleté, et j’ai trouvé ça dingue. Et encore aujourd’hui, je le feuillette toujours, et continue à le trouver magnifique, aussi bien pour le graphisme que pour le scénario.
Le deuxième, c’est I’m a Hero. C’est une série que j’ai lu y a 5 ans. Et c’est la série la mieux dessinée que j’ai jamais vu.

JJ: Petite question à côté, par rapport à ça: qu’est-ce que t’en penses des mangas célèbres pour nous, de la culture basket et street, Slam Dunk et Kuroko no Basket?

VD: Oui, j’en ai vu, surtout Kuroko. Slam Dunk est un peu plus à l’ancienne. Mais j’ai kiffé.
Avec EyeShield 21, et Captain Tsubasa(Olive et Tom), ce sont les premières grosses références du manga sportif. C’était ouf de voir comment c’était raconté, que tu regardes ou lises.

JJ: Et donc derrière, une autre question: Pour toi, quel place a le marché français dans le monde du manga? Car quand on est français, le manga rime avec Japon.

VD: Alors en fait, la France est le deuxième pays consommateur de mangas au monde, après le Japon. Comme le fait d’être le 2ème pays du rap après les Etats Unis. Après, je pense qu’il n’y a pas encore eu un vrai buzz auprès d’un mangaka français, qui aurait fait un manga français, autrement dit pour les français.
Le problème selon moi dans le manga français, c’est qu’ils font des trucs qui ressemblent à des mangas japonais. Mais il y a quand même du potentiel en France, on est entrain de développer ça doucement, je pense.

JJ: Donc tu penses que les clés de la réussite pour un mangaka français, c’est de faire du manga à la française, au lieu du style japonais?

VD: Voilà, c’est exactement ça. Parce qu’en fait, nous ce qu’on kiffe dans les mangas, qu’on soit un fan un peu plus poussé ou pas, c’est qu’on y trouve des références exotiques. Tu vois des mecs manger avec des baguettes, boire du café froid… des choses qu’on a pas chez nous, ce qui nous intrigue et fait qu’on aime bien. Les mangakas français aiment trop appeler leur héros Sasuke, alors qu’en fait au Japon, c’est comme s’appeler Jean ou Norbert ici, ce qui n’a rien de stylé. Je pense qu’il faut développer ça autour de notre monde à nous, notre culture.

JJ: Donc dernière question avant de parler du manga précisément: penses-tu qu’il soit possible pour un français de s’exporter au Japon?

VD: En fait, c’est déjà fait. Y a une série qui est vendue au Japon en ce moment, qui est faite par un français du nom de Tony Valente. Il s’agit d’un shonen, donc pour des adolescents, où on trouve des magiciens et d’autres choses. Maintenant, y a une question que j’avais posé à un chara-designer super célèbre, qui a réalisé une grosse série japonaise du nom d’Evangelion. Et je lui avais directement posé la question suivante: est-ce que vous croyez un jour qu’un manga français pourrait avoir un succès aussi costaud que les blockbusters nippons? Et il m’avait dit que comme les japonais sont hyper amoureux de la France, qu’ils ont même fait des mangas sur les références françaises, dès lors qu’un truc connaît un buzz de ouf en France, alors il aura sa place sur le marché japonais. En espérant que ce soit Diamond Little Boy…

JJ: Donc comment tu nous résumes ton manga?

VD: Eh bien tu vois, c’est le premier manga de ce que j’appellerai du Street Manga.
Une catégorie à part du Shonen, du Seinen, du Shojo, de tous les genres qui existent. C’est donc un genre qui met en avant la culture underground française. Je pense que l’histoire est là. En tout cas, la thématique concerne la culture underground française.

JJ: Peux-tu nous présenter le personnage principal?

VD: Le personnage principal s’appelle Victor, comme moi. En fait, c’est un récit semi auto-biographique, dans le sens où je ne raconte pas des trucs que j’ai pas fait, donc où je m’invente pas une vie.
Ca traite de la délinquance, ainsi que de la vente de stups, et ça veut dire que ce qui arrive au personnage, même si ça ne m’est pas arrivé à moi, ça peut être déjà arrivé à certains de mes meilleurs pôtes, ou des gens de notre entourage. Parce que ce sont des trucs qu’on connaît tous, tu vois.
Quand t’es français, et que tu vis et évolues dans un milieu populaire, bah t’es obligé de connaître certains trucs, d’avoir tes classiques et références à toi. Et c’est de ça que ça parle.

D’ailleurs, la devise du manga c’est: « Ce manga, ça raconte mon histoire, et certainement aussi la votre ».

JJ: Et donc maintenant, ma question par rapport à ton manga, mais qu’en est-il des autres inspirations?

VD: Pour tout ce qui concerne la manière de raconter, les plans que j’utilise, la façon de travailler, les références viennent éventuellement des biopics américains, dont j’aime bien le style narratif.
Enfin, par rapport aux séries, Walking Dead, Breaking Bad, pour leur façon de mettre du suspense.
On trouve donc des codes séries, et des codes mangas à appliquer.

JJ: Je suppose que comme nous voyons ça de l’extérieur, que nous sommes pas dans le monde du manga, on irait s’imaginer que tu as réalisé ton oeuvre tout seul. Explique-moi comment ça s’est passé?

VD: Alors, il faut déjà savoir que j’ai arrêté l’école après la 3ème, et qu’en plus j’ai jamais pris de cours de dessin de ma vie. Du coup, ce fut compliqué de tout lancer. En fait, ce manga je l’ai commencé il y a trois ans, au cours desquelles je l’ai recommencé au moins trois fois. La version définitive est celle que je présente actuellement. Au départ, j’ai commencé tout seul, avec mes propres moyens. Puis à force de dessiner régulièrement, j’ai vite évolué. Mais à force, j’ai fini par prendre conscience de mes limites.
Je me suis donc entouré de mecs qui ont fait une école d’art. Mais ça fait qu’on est pas du tout du même monde, qu’on communique différemment… ils ne comprennent pas du tout le délire underground, car ils viennent de familles différentes de ce dernier.

JJ: Et donc, une question que je me posais: la bd et le manga appartiennent vraiment à deux cultures trop différentes?

VD: En fait, c’est même pas comparable. Le manga a été défini par leur manière de publier ça au Japon.   Là bas, c’est pré-publié, avant d’être relié en tome. Ca passe par un gros hebdomadaire, vendu à des millions d’exemplaires, connu sous le nom de JUMP. De plus, les mangakas japonais sont plutôt polyvalents. On trouve souvent des auteurs qui travaillent sur plusieurs séries en même temps, même si l’auteur de One Piece est une exception, car c’est la série la plus vendue au monde, donc la plus grosse licence manga de la planète. Les BD Franco-Belge, quant à elles, sont davantage graphiques, avec beaucoup de moyens, et leurs créateurs prennent un an pour faire 40 pages. Donc c’est pas le même rythme de travail. Et souvent, les mecs sont tout seuls pour tout faire.

JJ: Donc pour conclure, on te souhaite quoi pour la suite?

VD: La suite, ce serait de signer dans une maison d’édition, et avoir la plus grosse licence manga en France.